OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 Sarkozy manque d’excellence http://owni.fr/2012/03/30/veritometre-sarkozy-manque-internats-excellence/ http://owni.fr/2012/03/30/veritometre-sarkozy-manque-internats-excellence/#comments Fri, 30 Mar 2012 16:21:22 +0000 Marie Coussin http://owni.fr/?p=104200 OWNI - i>TELE , juste devant Marine Le Pen.]]>

Peu de mouvement ce jour dans le classement du Véritomètre, permettant de vérifier l’exactitude des déclarations chiffrées ou chiffrables des six principaux candidats à l’élection présidentielle. Jean-Luc Mélenchon continue la course en tête avec 63,4 % de crédibilité tandis que Nicolas Sarkozy et Marine Le Pen restent englués dans le bas du classement, avec respectivement 43,8 et 41,6 % de crédibilité.

Ces dernières 24 heures, l’équipe du Véritomètre a vérifié 28 citations chiffrées des candidats à la présidentielle. Résumé des quelques faits chiffrés qui ont retenu notre attention.

Nicolas Sarkozy en interne

Le Président-candidat est fier de ses internats d’excellence, établissements créés sous son mandat (en 2008) par le ministère de l’Éducation nationale, et adaptés aux collégiens, aux lycéens et aux étudiants en difficulté scolaire. Il cite leur bilan à plusieurs reprises.

Lors de l’émission Des paroles et des actes sur France 2 le 6 mars :

On va vers les 20 000 places en internat d’excellence.

Puis à l’occasion de l’émission Parole de candidat sur TF1 le 12 mars :

Nous avons créé les internats d’excellence [...] 20 000 places.

Il évoque de nouveau ce sujet lors de son meeting de Nantes, le 27 mars. Les termes employés ne sont pas strictement similaires – il parle désormais d’“enfants” et non plus des “places” – mais ils recouvrent la même réalité. Le chiffre évoqué, lui, est divisé par deux :

Les internats d’excellence (…) qui concernent aujourd’hui 10 000 enfants.

Dans ces estimations, le Président-candidat joue sur les mots. Il sous-entend tout d’abord que les 20 000 places ont déjà été créées ou le seront dans un futur proche : or ce chiffre constitue, selon le ministère de l’Education nationale et l’Agence de rénovation urbaine, un objectif affiché à horizon 2015. Et concerne des places labellisées “internat d’excellence” qui peuvent donc être créées dans des internats “conventionnels” .

L’imprécision se retrouve aussi dans le nombre d’élèves concernées par cette mesure. A la rentrée 2011, 10 300 élèves disposaient d’une place labellisée “internat d’excellence” dans un internat “conventionnel”. Mais seuls 2 400 étudiaient dans un “internat d’excellence”.

Eva Joly bien logée

La candidate d’Europe-Écologie Les Verts s’intéresse à un autre type de logement que les internats d’excellence, et avec plus de succès que son concurrent de l’UMP. Invitée de la Matinale de Canal+ le 27 mars, elle expliquait :

[Un logement basse consommation] ça coûte légèrement plus cher. Ca coûte 15 % environ plus cher.

L’Agence de l’environnement et de maîtrise de l’énergie (Ademe), qui travaille entre autres sur le label “Bâtiment basse consommation”, donne raison à la candidate : le coût médian de construction des bâtiments neufs observés dans le cadre du PREBAT (mis en place par le Gouvernement en 2004 et qui vise à aider la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement) se situe à 1 450 euros HT/m2, “soit un surcoût d’environ 15 % par rapport au coût moyen de la construction.”

Hollande précise les chômeurs

Une des difficultés que nous rencontrons dans nos vérifications est la très forte utilisation par les candidats du nombre de “chômeurs” alors même que cette définition statistique n’existe pas. L’organisme de référence, la Dares, comptabilise uniquement le nombre de demandeurs d’emploi, selon différentes catégories.

François Hollande, lors de son discours à Boulogne-sur-Mer, le 27 mars dernier, a fait un effort pour préciser ses propos. Il a ainsi énoncé :

Et si on veut prendre, uniquement, celles et ceux qui n’ont aucune activité et qui demandent un emploi. Il y a près de trois millions qui sont dans cette situation.

François Hollande fait ici référence à la catégorie A des demandeurs d’emploi, qui sont ceux étant en recherche active d’emploi et déclarés sans activité. Et son estimation est exacte, à 3,4% près : d’après les dernières données disponibles, les demandeurs d’emploi de cette catégorie étaient 3,1062 millions en février 2012.


Les vérifications des interventions sont réalisées par l’équipe du Véritomètre : Sylvain Lapoix, Nicolas Patte, Pierre Leibovici, Grégoire Normand et Marie Coussin.
Retrouvez toutes nos vérifications sur le Véritomètre et nos articles et chroniques relatifs sur OWNI
Illustrations par l’équipe design d’Owni /-)

]]>
http://owni.fr/2012/03/30/veritometre-sarkozy-manque-internats-excellence/feed/ 0
Hollande se prend une tuile http://owni.fr/2012/03/22/hollande-tuile-veritometre-immobilier/ http://owni.fr/2012/03/22/hollande-tuile-veritometre-immobilier/#comments Thu, 22 Mar 2012 18:35:56 +0000 Sylvain Lapoix http://owni.fr/?p=103093 OWNI-i>TÉLÉ, Nicolas Sarkozy dégringole, notamment à cause de chiffres surprenants sur la rénovation urbaine. Marine Le Pen est toujours bonne dernière et force sur les mariages. Tandis que François Hollande a du mal avec les droits de mutation sur l'immobilier. ]]>

Depuis son passage sur TF1 dans l’émission Parole de candidat rien ne va plus pour Nicolas Sarkozy dans le classement du Véritomètre, permettant de vérifier l’exactitude de toutes les déclarations chiffrées ou chiffrables des six principaux candidats à l’élection présidentielle. Avec plus de 100 citations vérifiées, il s’agit du plus gros factchecking réalisé par notre équipe de vérificateurs et, avec 36% de déclarations correctes, du plus gros boulet du président-candidat : il l’a d’un coup ramené à 43,6% de crédibilité moyenne sur toutes ses interventions, à un peu plus d’un point de la dernière des prétendants, Marine Le Pen (42,5%). A l’autre bout du classement, Jean-Luc Mélenchon a repris la tête à 62,3%, suivi de près par Eva Joly (59,3%), elle même talonnée par François Hollande (58,4%).

Au cours des 72 dernières heures, l’équipe du Véritomètre a vérifié 27 citations chiffrées des candidats à la présidentielle. Voici un instantané des chiffres les plus étonnants de ces derniers factcheckings.

Le déménagement, c’est maintenant !

Ouvrant la semaine politique dans la matinale de France Info lundi 19 mars, François Hollande s’est penché sur les réductions d’impôts préconisées par son adversaire de l’UMP, notamment sur le logement :

Les droits de mutation sur l’immobilier [c'est] 10 milliards [d'euros].

Payés par les acquéreurs de biens immobiliers au moment du changement de propriétaire, les droits de mutation sont une ressource fiscale importante pour les départements qui les encaissent. Or, si leur montant a beaucoup varié, il n’a atteint les 10 milliards d’euros qu’en 2007, année record. Depuis, selon les chiffres du Projet de loi de finances 2011, ils sont retombés bien en dessous de ce seuil à 7 milliards d’euros. Même si des déclarations du ministre des Collectivités territoriales au Figaro évoquaient un chiffre supérieur de 16% pour 2011, à 8,1 milliards d’euros, la différence avec l’estimation de François Hollande n’en reste pas moins très importante.

Marine Le Pen force sur les mariages

Pour la candidate et présidente du Front national, l’explication unique à la tuerie de Toulouse est le développement de l’Islam radical en France et le laissez-aller des autorités sur les comportements communautaristes. Un point de vue qu’elle a de nouveau développé jeudi 22 mars au matin sur l’antenne de France info, insistant notamment sur un chiffre saisissant :

Il y a 70 000 mariages forcés dans notre pays, 70 000.

Un propos frappant puisqu’il revient à affirmer que plus d’un mariage sur quatre enregistrés par l’Etat civil (241 000 en 2011 selon l’Insee) seraient des mariages forcés, comme n’ont pas manqué de le relever les internautes :

Un chiffre aussi saisissant qu’invérifiable, aucune statistique officielle ou ministérielle n’ayant été produite à notre connaissance sur le sujet. Seul un rapport du Haut conseil à l’intégration de 2003 fait été d’une estimation de 70 000 adolescentes mariées de force chaque année dans le pays, chiffre “impossible à confirmer”, selon un rapport du ministère de la Justice publié en 2008. Et pour cause, selon une enquête de nos confrères du Monde du 19 novembre de la même année, il correspondrait en fait au “nombre de jeunes filles de 15 à 18 ans originaires des pays où existe cette pratique”. De quoi jeter défintivement le doute sur cette déclaration.

Nicolas Sarkozy à la rue sur l’Anru

Même si elle remonte au lundi 12 mars, l’intervention de Nicolas Sarkozy sur TF1 dans le cadre de l’émission Parole de candidat le 12 mars et ses cent citations chiffrées ou chiffrables continuent de nous réserver des surprises. Alors que nous avions déjà vérifié que le président-candidat s’attribuait une part exagérée des investissements réalisés dans le cadre du Programme national de rénovation urbaine, nous avons pu nous intéresser à une autre déclaration portant sur le même programme :

454 quartiers [ont été] rénovés [dans le cadre du Programme national de rénovation urbaine]

Sans statistiques disponibles pour s’assurer de la véracité de cette affirmation, nos vérificateurs ont donc décroché leur téléphone pour appeler l’Agence nationale pour la rénovation urbaine. En complément du rapport sur l’état d’avancement, le service de communication de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (Anru) nous a fait parvenir un chiffre sur les projets menés à leur terme : “100 conventions sont achevées ou en cours d’achèvement dans le cadre du PNRU”. La liste (que vous retrouverez en document partagé) précise bien que chacun de ces “succès” correspond à un quartier visé par une convention de l’Anru. Un répertoire impressionnant mais 4,5 fois moins que le chiffre vanté par Nicolas Sarkozy.


Les vérifications des interventions sont réalisées par l’équipe du Véritomètre : Sylvain Lapoix, Nicolas Patte, Pierre Leibovici, Grégoire Normand et Marie Coussin.
Retrouvez toutes nos vérifications sur le Véritomètre et nos articles et chroniques relatifs sur OWNI
Illustrations par l’équipe design d’Owni /-)

]]>
http://owni.fr/2012/03/22/hollande-tuile-veritometre-immobilier/feed/ 6
Le Véritomètre du soir http://owni.fr/2012/03/06/le-veritometre-du-soir-marine-le-pen-francois-bayrou/ http://owni.fr/2012/03/06/le-veritometre-du-soir-marine-le-pen-francois-bayrou/#comments Tue, 06 Mar 2012 17:48:03 +0000 Equipe Véritomètre http://owni.fr/?p=100952 OWNI-i>TÉLÉ, alors que François Bayrou se rapproche de la lanterne rouge. Chaque soir, les data-journalists d'OWNI mesurent la crédibilité des candidats à la présidentielle et établissent leur classement grâce aux bases de données de l'application.]]>

Ce mardi 6 mars à 18 heures, l’indice de crédibilité du Véritomètre place Eva Joly en tête avec 70,5 % et Marine Le Pen à la dernière place avec 40,5 % de références chiffrées exactes, devancé d’une courte tête par François Bayrou qui dégringole à 43,5 %  (retrouvez l’ensemble du classement en bas de cet article). Au cours des dernières 24 heures, l’équipe du Véritomètre a vérifié 31 citations quantitatives. Résumé des principaux éléments.

L’immigration du travail explosée par Marine Le Pen

L’immigration est une question qui taraude le Front national. Lors de son interview au Grand Jury RTL-LCI-Le Figaro du 4 mars dernier, la candidate frontiste évoque cette thématique à deux reprises.

l’immigration de travail a explosé sous Nicolas Sarkozy

Entre 2005 et 2010, plus 112% d’immigration de travail.

Les vérificateurs d’OWNI cherchent toujours un indice fiable pour savoir à partir de quand un taux explose. Quoi qu’il en soit, les chiffres évoqués par Marine Le Pen sont faux.

Sur la période 2005-2009, le nombre de titres de séjour délivrés pour motif économique – plus communément appelé “immigration du travail” - a augmenté de 59,4 % selon l’Insee, et de 61,7 % selon le ministère de l’Immigration.

Les chiffres bruts sont eux aussi révélateurs : l’immigration pour motif économique n’a concerné “que 19 575 personnes” en 2009 selon l’Insee. Un chiffre bien faible face aux 2 861 700 demandeurs d’emploi (catégorie A) recensés fin janvier 2012 par la Dares.

Bayrou adopte avec largesse

François Bayrou continue de porter sa défense de l’adoption homoparentale devant les médias. Mardi 6 mars à la Matinale de Canal+, il expliquait notamment qu’il s’agissait d’ores et déjà d’une réalité. Chiffres à l’appui :

Il y a des années, il y a des dizaines de milliers de célibataires (…) qui adoptent des enfants en France.

Sauf que : quelque soit le profil des adoptants (couples, familles, célibataires) le nombre d’adoptions internationales n’a jamais dépassé 4 080, depuis 1980. Même en y ajoutant les pupilles de l’État placées en vue d’adoption : 816 en 2008 selon les dernières données disponibles. Sachant de plus que les célibataires représentent entre 10 et 13% des adoptants selon l’Agence française de l’adoption (AFA), aucune chance d’arriver au chiffre évoqué par François Bayrou.

Une balance bien équilibrée

S’il est un chiffre que les candidats maîtrisent, c’est celui de la balance commerciale.

Que ce soit Marine Le Pen “[en 2002] on exportait beaucoup plus, on avait une balance [commerciale] excédentaire” ou François Bayrou “tous les ans et tous les mois, voilà que s’effondre notre balance commerciale”, leurs estimations sont justes : excédentaire en 2002 (0,61 milliards d’euros), la balance commerciale de la France a connu un solde déficitaire depuis dix ans, pour reprendre le phrasé mesuré de François Bayrou.

Eva Joly, plus ch’ti que Paris

Le Nord-Pas-de-Calais, ils sont en train d’isoler 100 000 logements.

expliquait Eva Joly sur RTL le 5 mars. Une citation correcte : dans le cadre de la lutte contre le changement climatique dans la région du Nord Pas de Calais, l’Agence de l’Environnement et de la Maîtrise de l’Énergie (ADEME) et le Conseil régional ont l’ambition de réhabiliter 100 000 logements en 4 ans.

Eva Joly est plus au fait du logement dans la région Nord que la région parisienne. Elle estimait sur Dimanche+ le 29 janvier dernier qu’il y avait “deux millions de logements vacants” dans cette région. Un chiffre exact, mais pour la France et non l’Ile-de-France.

Cliquez sur l'affiche pour accéder à la dernière mise à jour des statistiques


Retrouvez l’ensemble de nos vérifications sur Le Véritomètre OWNI-i>TELE

Illustrations par l’équipe design d’OWNI

]]>
http://owni.fr/2012/03/06/le-veritometre-du-soir-marine-le-pen-francois-bayrou/feed/ 10
Les data en forme http://owni.fr/2012/03/05/les-data-en-forme-episode-23/ http://owni.fr/2012/03/05/les-data-en-forme-episode-23/#comments Mon, 05 Mar 2012 11:36:45 +0000 Paule d'Atha http://owni.fr/?p=100667 OWNI vous embarque dans un projet de démocratie ouverte et dans de jolis univers graphiques issus de l'Open Data. Le monde de la donnée peut être beau, et vous pouvez être beau ou belle à l'intérieur de ce monde-là.]]>

Le Centre de pédagogie urbaine (CUP) est une organisation à but non-lucratif qui tente d’améliorer l’engagement citoyen au moyen de l’art et du design. Ses projets “démystifient les politiques urbaines et les problèmes d’organisation qui ont un impact sur nos quartiers, pour que davantage d’individus puissent participer à leur modélisation”. Le projet “Envisioning Development: What is Affordable Housing?” [en] apporte un souffle de vitalité passionnant dans le monde en mouvements qui est le nôtre, et qui tourbillonne chaque jour davantage sous les frétillements de la masse curieuse devant l’inévitable. Le monde change, les citoyens s’emparent des sujets centraux de la société. C’est nouveau, et ça va tout changer.

L’idée de “affordable housing” (logement abordable) peut paraître banale, comme l’indique le site, sauf qu’il revêt souvent de nombreuses significations selon la position que vous vous attribuez sur l’échelle sociale. Le CUP a donc réalisé un atelier interactif en kit permettant de comprendre pourquoi la seule question vraiment importante à se poser au moment de bâtir des logements est : “abordable pour qui ?”. Un kit qui encourage donc le citoyen à devenir le porte-voix de la raison par la data afin d’évangéliser d’autres citoyens ainsi que les élus. Sans aucun doute la première graine new-yorkaise d’une longue série d’initiatives populaires qui viendront essaimer nos contrées au gré du vent printanier.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

La data è mobile

Plus près de chez nous, l’un des joyaux culturel européen a rouvert cette semaine son portail Open Data : Florence [it]. Après un lancement discret en octobre dernier, la cité toscane se relance modestement en ajoutant à son patrimoine 180 petits jeux de données en licence CC-BY, et en enrichissant son offre d’une section de geodata permettant la création aisée de cartes, ainsi qu’en commençant à publier tout le bazar en Linked Open Data, autant dire que ça rigole pas.

En tout cas, les Florentins devraient permettre à l’Italie de remonter au classement PSI [en] élaboré par la plate-forme européenne du même nom, PSI signifiant “Public sector information”. Ce classement, toujours en version beta, est “un outil pour mesurer le niveau de l’Open Data et de la réutilisation des données publiques à travers l’Europe”. Le principe est amusant, sans grande prétention, et possède deux atouts à nos yeux : tout d’abord, c’est un projet entièrement fondé sur le principe du crowdsourcing, c’est-à-dire que l’EPSI compte sur les spécialistes de l’Open Data locaux pour remonter les initiatives de chaque pays ; en échange de quoi, l’ensemble des données récoltées seront reversées à la communauté lorsque le classement sortira de sa phase beta – ce qui serait imminent. Deuxième initiative plaisante : l’utilisation de la toute jeune plate-forme de création de visualisation de données infogr.am. Et ça, c’est vraiment bon esprit.

Tête dans le flux

L’Open Data et l’Open Gov, on sait évidemment en faire en France. (Tiens, petite bulle hors du temps, la lecture d’un récent billet du jeune patron des Données Ouvertes tricolores cause démocratie et transparence, gardons-le sous le coude.) La Poste, elle aussi, aime ça. Elle aurait tort de se priver : avec son incomparable maillage, avec les flux continus de matière qu’elle transmet quotidiennement au cœur de la société, avec l’époustouflant réseau qui tisse et relaie l’information en permanence, elle possède une sacrée matière à exploiter. C’est d’ailleurs ce qu’elle a fait en s’associant avec le laboratoire FaberNovel : en se basant sur “le fichier anonymisé des changements d’adresse de La Poste”, elle a démontré sa dextérité dans le maniement de la visualisation dynamique en mettant en scène de manière fort esthétique “les mouvements des familles depuis et vers les Bouches-du-Rhône” en 2009. En vert c’est d’où ça vient, en rouge c’est où ça va. Le projet “Flux2” est tout simplement beau à regarder.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Puisque nous en sommes aux (télé-)communications, on pourra aussi jeter un oeil cette semaine à l’intéressante initiative Sensor.ly, qui “aide les opérateurs mobiles à améliorer la qualité de leurs réseaux” grâce à une communauté de testeurs enregistrant quotidiennement “la présence de couverture et la puissance du signal radio reçu par leur terminal”. On aura compris que le projet, qui veut offrir au grand public un moyen simple de comparer la couverture des opérateurs mobile à travers le pays, aura donc besoin d’étoffer ladite communauté de testeurs s’il veut gagner en ampleur et en crédibilité. En tout état de cause, l’idée est bonne, et nous avons hâte de voir comment elle évoluera, et de quelle manière les opérateurs – qui n’ont pas toujours énormément d’humour lorsqu’il s’agit de mettre le doigt publiquement sur la qualité de leur service – s’empareront de ce sujet qui concerne la majeure partie de la population.

Datalife

Et puisqu’on en est à parler mobile et qu’on a toujours un immense plaisir à faire tourner les jolies data, un hommage à la Suisse et au projet “Ville Vivante” qui (re)trace de manière enthousiasmante la circulation permanente des téléphones au sein de la ville de Genève. Ce n’est pas la première fois que nous partageons notre admiration pour cette façon originale, comme gavée aux particules élémentaires, de fabriquer des cartes (é)mouvantes pour représenter la data. Celle-ci comme les autres semble unique, figée dans une géographie temporelle et féérique, abîmée dans l’irréel et l’abstraction d’un monde pourtant bien concret au travers des milliards de bits de données qu’il a fallu rassembler pour la produire.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Un petit concerto de J.S. Bach et le talent de Stephen Malinowski pour vous souhaiter une magnifique semaine à tou(te)s !

Cliquer ici pour voir la vidéo.


Retrouvez tous les épisodes des Data en forme !

]]>
http://owni.fr/2012/03/05/les-data-en-forme-episode-23/feed/ 3
Le Crésus des HLM http://owni.fr/2012/03/01/le-cresus-des-hlm/ http://owni.fr/2012/03/01/le-cresus-des-hlm/#comments Thu, 01 Mar 2012 00:45:00 +0000 Claire Berthelemy http://owni.fr/?p=99883

Les Presles à Epinay-sur-Seine en 2008 ©-Cyrus Cornut/Dolce Vita/Picturetank

La Mission interministérielle d’inspection du logement social (Miilos) a de nouveau épinglé un office HLM et son directeur général, Bernard Marette, qui dirige Habitat 76, principal office HLM de Seine-Maritime. Tout un symbole. Car Bernard Marette est en outre le patron de la Fédération des directeurs d’offices HLM de France; l’organisme chapeautant donc l’ensemble des relations entre les responsables des offices et les pouvoirs publics.

Nous avons sollicité à plusieurs reprises Bernard Marette pour qu’il s’explique sur les faits qui lui sont reprochés par cette mission d’inspection, sans obtenir de réponse.

15.000 logements au bord du scandale

15.000 logements au bord du scandale

À Marseille, 15.000 logements sont menacés par de multiples pratiques douteuses. Un rapport officiel, très discret, en ...

Ainsi, dans un rapport rendu par la Miilos en septembre dernier, et dont nous avons obtenu une version non expurgée, les auteurs pointent du doigt Habitat 76, qui gère quelque 30 000 logements sur toute la Seine-Maritime. En tête de leurs griefs : son insuffisance de production de logements sociaux mais aussi la rémunération et le train de vie de son directeur général.

20 000 euros

L’homme est en poste au sein de l’office HLM depuis 2001, avec un contrat de travail qui au gré du temps s’est adapté à la réglementation sur le statut des patrons d’offices HLM. Or, après la publication en octobre 2009 d’un décret définissant le nouveau système de rémunération de ces dirigeants, Bernard Marette décide que cette disposition lui bénéficiera de manière rétroactive. Une faute selon la Milos. Qui comptabilise les revenus indus qu’il aurait ainsi perçus : 20 000 euros de trop pour l’année 2009 et 17 000 euros pour 2010. En plus de l’utilisation d’un 4X4 de luxe, de facture allemande, un peu superflue au yeux des inspecteurs.

Les Choux Creteil 2009 ©Cyrus Cornut/Dolce Vita/Picturetank

Pour faire passer la pilule au conseil d’administration, le président d’Habitat 76, Didier Marie, par ailleurs président du Conseil général de Seine-Maritime, tente de trouver des justifications, selon le procès-verbal de cette réunion (reproduit ci-dessous). Il précise notamment, à propos de Bernard Marette :

Ainsi, prenant en compte ce contexte, mais aussi les différentes responsabilités que votre directeur général a été amené à assumer, notamment en présidant pendant près de six années, l’association régionale HLM regroupant les 38 organismes de Haute Normandie, en participant aux travaux de la Fédération nationale des directeurs d’office en tant que vice président puis récemment Président et ceux de la fédération des office en tant que conseiller fédéral, je vous propose d’arrêter pour trois exercices à compter de 2009, comme le permet le décret, la partie variable au niveau au-delà duquel une autorisation bi-ministérielle serait nécessaire, soit 15%.

Motif invoqué

Mais en examinant les nouvelles clauses qui imposent ces suppléments de salaires, le rapport de la mission note que les responsabilités au sein de la Fédération nationale des directeurs d’offices HLM ne peuvent pas être un motif sérieux. Et la Miilos de préciser dans l’une de ses annexes (voir ci-dessous) :

Pour la bonne compréhension du lecteur, il convient de préciser que le Directeur général est membre du bureau fédéral de la Fédération des OPH (Trésorier) et président de la Fédération nationale des directeurs d’OPH. À ce titre, il participe à différents groupes de travail (statut des offices, communication, Europe) ou commissions thématiques (commission employeurs, fédération, partenaire). La Mission relève, à la lecture des statuts et du règlement intérieur de la Fédération nationale des offices publics de l’habitat (article 6) que les fonctions de membres du Conseil fédéral sont exercées à titre gratuit [...]. En conséquence, ce motif invoqué, celui de la participation à différentes instances professionnelles pour justifier l’augmentation de la rémunération du DG est contraire aux règles statutaires dont s’est dotée la Fédération. Par ailleurs, la Mission a constaté que l’avenant au contrat signé le 23 octobre 2009 ne mentionne pas cet élément.

Epinay-sur-Seine ©Cyrus Cornut/Dolce Vita/Picturetank

Irrégularités

Pour sa défense, dans différents échanges, le directeur général, sous la houlette de Didier Marie, explique à la Milos que la rémunération est basée sur les comptes clôturés de l’année 2008 et que ” le décret comporte une mesure ou référence rétroactive puisqu’il conditionne le calcul de la rémunération au nombre de logements locatifs gérés par l’office…”. Une interprétation que la mission interministérielle ne reprend pas à son compte.

Cité du Luth à Gennevilliers ©Cyrus Cornut/Dolce Vita/Picturetank

Mais le ministère de l’Écologie, du développement durable, des transports et du logement n’est pas resté sans réaction face à ces situations sulfureuses. Bernard Marette en habits de président de la Fédération des directeurs d’offices HLM était intervenu début novembre 2011 auprès d’un haut-fonctionnaire du ministère pour discuter de façon informelle de la régularisation des irrégularités sur les salaires des patrons des offices. Quelques jours plus tard, Étienne Crépon, directeur de service au ministère de l’Ecologie, le rappelle à l’ordre (voir courrier ci-dessous) :

Depuis l’entrée en vigueur du nouveau statut des directeurs généraux d’offices publics de l’habitat (OPH), les premières remontées des contrôles de la Miilos font apparaitre quelques lacunes dans l’application des dispositions du Code de la construction et de l’habitation. Par ailleurs, j’observe dans les publications de la Fédération quelques inexactitudes, sources potentielles d’insécurité juridique pour les OPH.

Modes de calcul

Globalement, la levée de boucliers ministériels déclenchée par le rapport de la Milos semble titiller les différentes acteurs du dossier. Deux amendements ont été déposés à la suite du projet de loi sur la majoration des droits à construire votée par l’Assemblée la semaine dernière et du projet de loi sur la simplification du droit devant le Sénat. Tous deux en procédure accélérée. Ils suggèrent d’inscrire dans la réglementation de nouveaux modes de calcul des salaires versés aux dirigeants d’offices HLM.

Cité Pagel, stade de l'Ile de Vannes à Ile-Saint-Denis, 2008. ©Cyrus Cornut/Dolce Vita/Picturetank

Photographies de Cyrus Cornut/Dolce Vita, via Picture Tank. Tous droits réservés ©

]]>
http://owni.fr/2012/03/01/le-cresus-des-hlm/feed/ 15
La hotline des Guérini affole le PS http://owni.fr/2011/06/23/la-hotline-des-guerini-affole-le-ps/ http://owni.fr/2011/06/23/la-hotline-des-guerini-affole-le-ps/#comments Thu, 23 Jun 2011 15:13:29 +0000 Claire Berthelemy et George Kaplan http://owni.fr/?p=71360 L’ancien ministre socialiste de la défense Alain Richard remet aujourd’hui à Martine Aubry son rapport sur la fédération PS des Bouches-du-Rhône. Et sur les graves soupçons de dérives clientélistes qui visent les élus locaux de Marseille et de sa région. Jusqu’à présent, de nombreux responsables parisiens ont défendu Jean-Noël Guérini, le tout-puissant président socialiste du Conseil général des Bouches-du-Rhône.

Mais au Tribunal de grande instance de Marseille, le juge Charles Duchaine rassemble de plus en plus d’éléments compromettants pour Jean-Noël Guérini. Dans le cadre d’une procédure instruite contre son frère, Alexandre Guérini, poursuivi pour corruption, trafic d’influences, détournements de fonds publics et escroqueries en bande organisée.

En un peu plus d’un mois, les gendarmes, sur commission rogatoire du juge, ont multiplié les perquisitions. Dès le 2 mai chez 13 Développement, société d’économie mixte oeuvrant pour le Conseil général et le lendemain au sein même du Conseil général – de nouveau perquisitionné le 17 juin.

Le 3 mai, alors que la commission présidée par l’ancien ministre Alain Richard auditionnait élus et militants du PS local sur le fonctionnement de la fédération, les gendarmes se sont rendus chez 13 Habitat. Le plus gros propriétaire d’appartements HLM de la ville, avec 30.000 logements, soit deux fois plus qu’HMP, autre bailleur marseillais. Un office HLM dans lequel Jean-Noël Guérini et son père ont travaillé. Ce matin, c’est Jean-François Noyes, ex-président de 13 Habitat, qui est à nouveau entendu dans les locaux de la gendarmerie. Administrée par des proches de Jean-Noël Guérini, 13 Habitat a largement alimenté de curieux copinages, organisés par le frère, Alexandre Guérini.

En témoigne le script de conversations téléphoniques au sujet de l’attribution de logements à quelques personnalités marseillaises, écoutées par les gendarmes. On y découvre Alexandre Guérini donnant ses ordres à Jean-François Noyes, président jusqu’en avril dernier de 13 Habitat (autrefois appelé OPAC-Sud), et son assistante Antoinette Camiglieri. Comme le montre le procès-verbal ci-dessous.

Compte-rendu d’enquête

Dans cette écoute téléphonique interceptée le 4 mai 2009, Alexandre Guérini insiste pour que l’un de ses protégés habite dans le 4ème ou le 5ème arrondissement. Soit le 3ème secteur de Marseille, là où s’est jouée la campagne des municipales de 2008, que son frère Jean-Noël a perdu d’un cheveu face à Jean-Claude Gaudin – 49 sièges au conseil municipal pour les socialistes et 51 pour la majorité UMP.

Devant les enquêteurs, Jean-François Noyes, auditionné en qualité de témoin, a répété les affirmations qu’il tenait dans cette conversation sur la façon dont il a été nommé à la tête de l’institution. C’est Alexandre Guérini, a-t-il concédé, qui a recommandé à son frère Jean-Noël de le nommer. Quant à la dénommée Castagliotti, dont l’octroi d’un T3 est envisagé, il s’agit de la fille de Bernard Barresi, comme l’avait révélé Bakchich en décembre dernier. Fiché au grand banditisme, ce dernier est au croisement de deux affaires : celle des marchés truqués des Bouches-du-Rhône, mais aussi celle des marchés frauduleux de Haute-Corse, toutes deux instruites par le juge Duchaine. Bernard Barresi dort depuis juin 2010 à la prison de Luynes, près d’Aix, après 18 ans de cavale.

Et la liste des bénéficiaires du duo Alexandre Guérini/Antoinette Camiglieri ne s’arrête pas à ces deux seuls noms. Lors de son audition le 29 novembre 2010 à la section de la gendarmerie de Marseille, l’assistante de Jean-François Noyes essaie d’expliquer qu’elle n’en savait rien :

Question : connaissez-vous les nommés [...] COSTAGLIOTI, [...] ROUZAUD Antoine, [...] BARRESI, [...] NARDUCCI, [...]
Réponse : Tous ces noms ne me disent rien, sauf ceux des conseillers généraux Mme NARDUCCI, M. ROUZAUD Antoine.
Question : selon nos informations vous avez attribué des logements à ces personnes au cours de l’année 2009 en relation avec GUERINI Alexandre. Qu’avez-vous à dire ?
Réponse : C’est possible, je ne sais pas. Ce n’est pas moi qui attribue. Je n’en sais rien, je suis l’intermédiaire. [...]

Parmi les heureux élus donc, Antoine Rouzaud, vice-président de la fédération PS 13, administrateur de 13 Habitat et adjoint de la communauté urbaine chargé des déchets. Conseiller général sortant, il a été battu aux cantonales de mars dernier dès le premier tour, après une campagne acerbe de l’UMP sur “les affaires”.

Autre nom cité, celui de Lisette Narducci. Elle est maire de secteur et conseillère générale du Panier, fief politique historique de Jean-Noël Guérini. Figure aussi Patrick Rué, n°2 de Force Ouvrière, syndicat ultra-majoritaire à la ville et à la communauté urbaine de Marseille.

Pour les services rendus, les gendarmes soupçonnent Alexandre Guérini d’avoir appuyé une augmentation du salaire d’Antoinette Camiglieri. Aux enquêteurs, cette dernière a admis avoir “fait recruter” son mari, et sa fille et sa soeur :

Question : Avez-vous eu des augmentations récemment ?
Réponse : j’ai été augmentée l’année passée. J’ai pris 30 points. Je suis cadre et c’est normal. C’est ESCALLE Bernard qui me les a octroyés [NDLR : directeur de l'office].
Question : Pourquoi GUERINI Alexandre a-t-il expressément demandé, en mars 2009, à NOYES Jean-François que vous soyez augmentée ?
Réponse : je ne sais pas. je l’ignore. je ne lui ai pas demandé d’intervenir.
[...]
Question : Avez- vous fait recruter des membres de votre famille avec l’aide de GUERINI Alexandre ?
Réponse : j’ai fait recruter mon mari, Jacques, par M. GUENOD qui était à l’époque directeur général comme responsable du patrimoine. [...] Ma fille Anne-Laure est également embauchée comme assistante à 13 Habitat. Elle a été recrutée par M. COZZI il y a plusieurs années. Ma soeur O. Rose a été recrutée par M. ESCALLE ou M. GUENOD. [...]

Pourtant, Jean-Noël Guérini précisait en décembre 2010 :

Je ne suis concerné ni de près, ni de loin par les affaires et les entreprises de mon frère.


Illustration FlickR Paternité par sophie roques

]]>
http://owni.fr/2011/06/23/la-hotline-des-guerini-affole-le-ps/feed/ 7
Le clan Arnoux reste taulier de Marseille http://owni.fr/2011/06/15/le-clan-arnoux-reste-taulier-de-marseille/ http://owni.fr/2011/06/15/le-clan-arnoux-reste-taulier-de-marseille/#comments Wed, 15 Jun 2011 16:04:33 +0000 Claire Berthelemy http://owni.fr/?p=68044 En dépit des sévères critiques figurant dans un rapport d’inspection, la famille Arnoux garde la mainmise sur les loyers de Habitat Marseille Provence (HMP), l’organisme de la ville de Marseille qui loue un parc de 15.000 appartements HLM. La direction d’HMP nous a en effet confirmé qu’elle continuerait à confier le recouvrement de ses loyers à la société IAG d’Axel Arnoux.

Or, en janvier 2011, un audit de la Mission interministériel d’inspection du logement social (Miilos) – révélé par OWNI – fustigeait cette relation entre HMP et IAG, entamée en avril 2003. Selon la Miilos, la structure de cet homme d’affaires marseillais a été chargée, dans la plus grande opacité, de percevoir les loyers de certains baux commerciaux de Marseille. Dans une version non expurgée du rapport, que nous avons pu reconstituer, les inspecteurs écrivaient :

Depuis mai 2006, des prestations d’assistance et de conseil pour la gestion et le recouvrement des loyers relatifs à ses baux commerciaux ont été confiés pour un montant de 271.277,55 euros HT par l’office à la société IAG sans mesure de publicité ni mise en concurrence, en méconnaissance des dispositions du code des marchés publics.
HMP a eu recours au prestataire IAG en avril 2003, pour la gestion et le recouvrement des loyers relatifs aux baux commerciaux, dans le cadre d’un marché public signé aux termes d’un appel d’offres ouvert. Ce marché avait été passé pour une durée ferme de trois ans à compter de sa date de notification, soit jusqu’au 28 avril 2006.

Or, depuis cette date IAG a poursuivi ses prestations, en dehors de tout cadre contractuel valide et sans que l’organisme procède à la passation d’un nouveau marché public comportant la mise en œuvre de mesures de publicité et de mise en concurrence en méconnaissance des articles 16 (obligation de remise en concurrence périodique) et 26 (obligation de recourir à un marché passé selon une procédure formalisée) du code des marchés publics.

Aux yeux de la Miilos, le clan Arnoux (le père et ses deux fils) et la société IAG font fonction de syndicat de copropriété pour le bailleur depuis avril 2003 : gestion technique et administrative des locaux, répartition des montants des factures par exemple.
Le marché initial passé entre le bailleur et IAG courait sur 3 ans après un appel d’offre ouvert. Soit jusqu’à avril 2006. Fin avril le contrat s’est prolongé, en silence. Le lancement de l’appel d’offre et la notification du nouveau marché effectués, HMP estime avoir remis la situation à plat. Et le cabinet immobilier est toujours responsable des baux d’HMP. La Poste, des médecins, des auto-écoles et autres locaux commerciaux sont concernés.

La décision du bailleur de rendre public un marché pour lequel IAG avait l’exclusivité se teinte d’hypocrisie. À Marseille, cette question dérange : OWNI a contacté Axel Arnoux qui a refusé de s’expliquer sur la commande d’HMP et sur les conditions de son exécution. De son côté, Jean-Luc Ivaldi, président d’HMP, nous répond qu’IAG poursuivra cette année encore sa mission de recouvrement et de gestion de ses loyers mais pour “une période d’essai” courant jusqu’en décembre prochain. Pour le directeur général d’HMP :

Nous verrons si c’est intéressant ou pas. Et si nous sommes satisfaits.

Avec leur premier contrat passé en 2003, HMP et IAG imposent des périodes d’essai très extensives, même pour Marseille.

Illustration Flickr CC Le Calmar (by-nc)

]]>
http://owni.fr/2011/06/15/le-clan-arnoux-reste-taulier-de-marseille/feed/ 5
Le Paris touristique, ses étrangers et ses logements http://owni.fr/2011/06/12/paris-immobilier-touristique-etrangers-logements-pied-a-terre/ http://owni.fr/2011/06/12/paris-immobilier-touristique-etrangers-logements-pied-a-terre/#comments Sun, 12 Jun 2011 11:23:20 +0000 Seb Musset http://owni.fr/?p=67099 Un constat : ici, la plaie immobilière s’appelle “placement“.

Grâce à elle, sous deux variantes, “immeubles de bureaux (vides)” pour banques ou entreprises et “investissement locatif” pour particuliers, il devient impossible pour une famille moyenne, sans héritage ou indispensablecoup de pouce parental“, de vivre, à la location ou à l’achat, dans une ville qui vire à vue d’oeil au ghetto pour riches. NDLR : ce n’est pas tant le mot “riche” qui me défrise que celui de “ghetto“, le manque de mixité sociale (habitation comme commerce) étant un des fléaux foncier et sociologique de ce pays.

Que ce soit dans les villes-banlieues, les campagnes-ghettos et les capitales-villages aseptisées, le manque de mixité débouche sur le mépris respectif des populations, permet aux communautarismes de se renforcer, aux méfiances de prospérer.

Dsl, nous le destinons à la location saisonnière, plus rentable, plus fléxible car l’idée est que nous ayons un pied-à-terre à Paris.

Comme si le locataire parisien n’en avait déjà pas assez de la pénurie de logements (artificielle, Paris est une coquille vide), de la gentrification , de l’abondance de taudis (car bizarrement la folie foncière n’a d’équivalent dans l’excès que l’insalubrité de son offre), il doit désormais faire face à la mode de la “pied-a-terrisation” de la capitale.

Il s’agit pour un propriétaire de mettre son bien immobilier rénové et meublé à la location pour la classe-moyenne supérieure (étrangère généralement et en vacances spécifiquement) ou les cadres supérieurs. Se substituant ainsi au parc hôtelier, le proprio loue son 2 ou 3 pièces à 800 euros la semaine à une famille brésilienne, russe, allemande ou américaine qui, bien dans l’air du temps, pourra “s’imprégner de la vie parisienne” sans prendre le risque de bouger de son standing habituel.

Le propriétaire a deux options :

  • soit il déclare la location et empoche une réduction d’impôt de 50%,
  • soit il opère “au noir” et empoche bien plus.

Dans le deuxième cas, l’opération est sans risque. Les sommes sont payées à l’avance, par internet, ou en cash sur place. Il y a déjà bien peu d’inspecteurs du travail, autant dire qu’une brigade de contrôle des résidences secondaires est de l’ordre du rêve : pourtant c’est bien d’évasion fiscale dont il s’agit. Elle se double d’une gonflée mécanique des loyers parisiens. Le vivier de touristes étant inépuisable, à 800 euros ou plus par semaine, les tarifs déconnectés des réalités salariales s’expliquent un peu mieux.

Le proprio accumule les baux courts, gagne bien plus (défiscalisé ou sans le déclarer) qu’en louant à des “locaux” peu à peu parias dans leur propre ville. Il ne prend pas le risque de s’embarrasser à long terme de familles (beaurk) de revenus modestes (rebeuark) et garde la disposition de son appartement à peu près quand il le souhaite, sans même à avoir à se fader la moindre visite.

La pratique d’une poignée est devenue  une mode en trois ans. Au “désolé mais vous n’avez pas les garantis nécessaires” au relent d’aristocrate plutôt embarrassant en ces périodes pré-révolutionnaires, se substitue maintenant un “désolé mais vous n’êtes pas touristes” à la ségrégation plus friendly.

Ci-dessous, l’encart décomplexé de la rubrique “placement raison” d’un “Valeurs Actuelles” du mois dernier, récupéré dans la boite aux lettres de mes voisins virtuels:

Tout va bien dans le meilleur des mondes sauf pour les irréductibles masochistes qui travaillent à Paris. Pour servir nos bienheureux vacanciers, que ce soit pour la tambouille ou les conduire avec béret à travers St-Germain-des-Près au volant de 2CV bleu blanc rouge (véridique), ils doivent s’exiler en 27eme périphérie ou cramer l’intégralité de leur paye dans un loyer pour cage à lapins (si toutefois le dossier est accepté, ce qui n’arrive jamais sans Papa et Maman, encore eux, pour se porter caution).

Je passe sur la Disneylandisation de Paris qu’entraîne l’afflux des cornets deux boules en quête d’une “authenticité” que de leur cocoon surfing et de leurs excursions en tongs Armani à la recherche de cette tarte éthérée d’Amélie Poulain ils contribuent à détruire, ou sur les désagréments quotidiens de la cohabitation avec nos aventuriers du confort en safari chez les fauchés abandonnant sur le pallier leurs poubelles improvisées dans un sac MacDo avant de reprendre l’avion (véridique again). Pourquoi s’embarrasser des coutumes sanitaires de l’autochtone ?

Carte des résidences secondaires à Paris, par Alexandre Léchenet

La pied-à-terrisation concerne également l’achat sec. Là on passe dans une autre dimension, celle de l’hôtel particulier : les surfaces s’agrandissent, les appartements s’achètent par paquet de dix, des quartiers se vident.
Dans les zones de forte tension immobilière, cette pratique doit être interdite ou très fortement taxée. Les aides doivent se concentrer sur les logements sociaux, pour les résidents, et les hôtels, pour les touristes, et non sur une énième défiscalisation aux profits des plus riches qui a pour effet direct d’exclure tous les autres.

J’ai entendu dire que la municipalité se saisissait du dossier. Pour l’instant, on se félicite que Paris soit la capitale des tournages (avec crédit d’impôt) d’une flopée de navets et de nanars à la gloire d’un Paname de magasin de souvenirs“Wait and see” comme on dit désormais ici.

Bonus : la version vidéo du billet.

Cliquer ici pour voir la vidéo.

Article publié initialement sur Les jours et l’ennui sous le titre Peut-on encore habiter Paris #1 : la pied-à-terrisation

Retrouvez les articles d’OWNI sur le logement

Illustration Flickr CC Isodora Cepeda et Luc Legay

]]>
http://owni.fr/2011/06/12/paris-immobilier-touristique-etrangers-logements-pied-a-terre/feed/ 15
15.000 logements au bord du scandale http://owni.fr/2011/06/09/15-000-logements-au-bord-du-scandale/ http://owni.fr/2011/06/09/15-000-logements-au-bord-du-scandale/#comments Thu, 09 Jun 2011 14:31:03 +0000 Claire Berthelemy http://owni.fr/?p=67146 C’est désormais prouvé : la ville de Marseille gère ses HLM en multipliant irrégularités, embrouilles, et mauvaises manières. Un rapport de la Mission Interministérielle d’Inspection du Logement Social (Miilos), diffusé en petit comité, dresse un bilan accablant des activités de Habitat Marseille Provence (HMP), l’un des plus gros bailleurs sociaux de la ville. 15.000 logements sur l’ensemble du territoire marseillais. Le rapport, achevé en janvier dernier, a été remis à quelques décideurs. Mais sans provoquer de réel changement dans la gestion de HMP, un office public dirigé par la municipalité. OWNI a décidé de mettre en ligne ce document, dans son intégralité (voir ci-dessous).

Parmi les négligences les plus graves, la Miilos met les élus en garde contre des retards importants dans l’entretien et la maintenance d’une partie du parc « susceptibles dans certains cas de ne pas garantir la sécurité des locataires ». Et énumère quelques lacunes à la limite du copinage coupable : absence d’appel d’offre pour l’assistance et le conseil pour la gestion et le recouvrement des loyers (confié à la même SARL depuis mai 2006); absence de contrôle interne et hiérarchique pour la tenue de la comptabilité, etc. Les conclusions des auteurs évoquent un inventaire de crapuleries organisées sur une vaste échelle :

Les taux de loyers supérieurs aux maxima conventionnels actualisés doivent être supprimés et les trop-perçus remboursés. HMP s’attachera à supprimer les irrégularités relatives à certaines prestations commandées sans publicité ni mise en concurrence et aux ventes de logements aux locataires qui ne respectent pas les prix maximum autorisés réglementairement.

HMP précise qu’il « prend acte des constats de la mission et qu’il poursuit » ses efforts. Si le rapport de la Miilos se limite à l’audit des exercices 2009 et 2010, la gestion très contestable d’HMP se révèle plus ancienne. Nous avons rencontré à Marseille des locataires lancés dans de véritables guérillas judiciaires pour faire valoir leurs droits auprès de l’organisme public.

Le 2 novembre 2010, la Cour d’appel de Marseille a donné raison à un collectif regroupant 89 d’entre eux. Leur cité, rentable depuis 1967, ne recevait pas les fonds indispensables à l’entretien extérieur et la rénovation des appartements. Une victoire historique pour ces familles, après onze années d’une procédure entamée en août 1999 avec une plainte contre HMP. Mais qui, sur le terrain, ne provoque pas de réels changements. Louise Nenna, présidente de la “Confédération Nationale du Logement 13″, que nous avons rencontrée, livre un constat désolé après cette décision :

Les travaux sont reculés tous les ans. Ils devaient commencer fin 2010 et sont repoussés au 4ème trimestre de 2011. L’organisme est en réalité condamné à effectuer des travaux qu’il n’a pas fait depuis 1926. Les façades, les volets, les fissures, etc., pour éviter les remontées d’humidité entre autres.

Le patron de HMP, Jean-Luc Ivaldi, ex-directeur adjoint du cabinet de Jean-Claude Gaudin, renvoie les locataires « à la lenteur de la justice ». Ailleurs, on cherche encore les explications. En 2007 par exemple, dans la cité des Lauriers (13ème arrondissement de Marseille), les habitants ont été privés d’ascenseurs durant plusieurs semaines. Même chose à la cité des Oliviers. Mais les ascenseurs changés, HMP n’a plus été en mesure de financer les travaux de réhabilitation et le gros entretien.

Sans véritables raisons.


Cet article est le premier volet d’une enquête au long cours. A suivre /-).

Illustration Flickr CC Nicolas Vigier

]]>
http://owni.fr/2011/06/09/15-000-logements-au-bord-du-scandale/feed/ 10
Sept mythes sur les bidonvilles http://owni.fr/2011/05/14/mythes-bidonvilles/ http://owni.fr/2011/05/14/mythes-bidonvilles/#comments Sat, 14 May 2011 11:48:17 +0000 emcee http://owni.fr/?p=62612

Il y a assez de ressources dans le monde pour les besoins de chacun, mais pas assez pour la convoitise de tous – Mohandas Karamchand Gandhi

Et pourtant, malgré les efforts des “agences internationales” depuis des décennies, les bidonvilles continuent de s’étendre partout dans le monde. Il doit tout de même y avoir quelque chose d’erroné dans le postulat de base, non ?

Voici les explications d’Adam W. Parsons dans l’article “The Seven Myths of Slums” publié dans Dissident Voice, le 10 décembre 2010.

Si on s’intéresse à la question des bidonvilles, quelques données fondamentales vont vite paraître évidentes. D’abord, le centre de la pauvreté dans le monde se déplace actuellement des campagnes vers les villes, et plus de la moitié de la population mondiale vit actuellement dans des zones urbaines pour la première fois de l’histoire de l’Humanité.

Deuxièmement, la majorité de la population mondiale, la majorité de ses plus grandes villes et la majorité de la pauvreté urbaine se situent aujourd’hui en Afrique, en Asie et en Amérique Latine – le prétendu monde en voie de développement.

Troisièmement, la croissance des bidonvilles depuis les années 1980 est à la fois impressionnante et sans précédent (même s’il y a eu des bidonvilles urbains en Europe depuis la révolution industrielle) et le nombre d’habitants de bidonvilles dans le monde devrait augmenter continuellement dans les prochaines décennies.

Le plus grand bidonville d’Asie qui se trouve à Bombay, a depuis 1950, grandi deux fois plus vite que la ville formelle avec une croissance moyenne de 8% contre 4% pour la ville de Bombay. Aujourd’hui, ce bidonville compte un peu plus d’un million d’habitants. Ce n’est plus un regroupement de baraques mais des structures qui recouvrent plusieurs centaines d’hectares. Des structures homogènes, compactes, sans équipements urbains ou presque, qui deviennent par leurs proportions gigantesques totalement inhumaines. (source)

Au-delà de ces faits, il n’y a, semble-t-il, guère de prise de conscience sur la réalité des bidonvilles dans l’imaginaire populaire. Grâce au travail infatigable de nombreux militants et d’ONG au cours de nombreuses décennies, la question de la pauvreté dans le monde est devenue une priorité, mais le problème des bidonvilles, qui constitue un élément essentiel de la pauvreté dans l’urbanisation des villes, ne s’inscrit toujours pas dans les préoccupations de la majorité des populations.

S’il y a beaucoup de publications spécialisées sur ces quartiers informels, l’image que donnent des bidonvilles les films populaires et la littérature contribue également à renforcer un certain nombre de préjugés tenaces contre les citadins pauvres.

L’indifférence méprisante exprimée par de nombreux gouvernements et citoyens des classes moyennes et bourgeoises aux problèmes que rencontrent les millions de gens qui vivent dans les bidonvilles peut également conduire à d’autres formes de discrimination ou de “mythes” sur les solutions à apporter au problème des logements précaires.

Véhiculé par les nombreuses publications au cours de ces dernières décennies qui reprennent les idées fausses sur la pauvreté dans le monde, le sentiment qui prévaut en Occident sur les questions de développement est souvent caractérisé par de nombreuses hypothèses, des poncifs et des théories sur les très pauvres qui vivent dans des pays lointains.

Si on dénonce certains de ces mythes fondamentaux sur la pauvreté, on peut éviter les solutions motivées par la culpabilité ou la crainte et s’intéresser alors aux causes structurelles de l’impuissance qui conduit à l’insécurité et le dénuement. Les mythes présentés ci-dessous sur les bidonvilles sont destinés à donner une vue d’ensemble sur un certain nombre de problèmes clés concernant les établissements humains – parmi lesquels, les effets de la mondialisation économique, le rôle des États, l’importance du secteur informel de l’emploi, la question de l’aide internationale, ainsi que la polémique (dont on parle peu) autour des chiffres sur les bidonvilles dans le monde et des projets pour le développement.

Mythe n°1 : la surpopulation

Il est facile de penser que les bidonvilles urbains résultent de la surpopulation citadine, ou de l’exode rural, et que, donc, les pouvoirs publics ne peuvent pas faire face aux problèmes de logement. Mais le véritable problème provient de structures institutionnelles dépassées, de systèmes judiciaires inadaptés, de l’incompétence des responsables nationaux et locaux, et de politiques de développement urbain de court-terme.

Dans une perspective plus large, la résurgence d’une idéologie de non-interventionnisme ces dernières décennies a affaibli les gouvernements nationaux et a conduit les États à revoir à la baisse l’importance qu’ils devaient accorder à une distribution plus équitable des ressources. Les États étant criblés de dettes, forcés de privilégier les remboursements de prêts plutôt que le financement des services publics indispensables, comme les soins de santé, et étranglés par le soi-disant Consensus de Washington qui exige que l’État se retire de pratiquement tous les secteurs de la vie publique, il est devenu impossible depuis les années 1980 aux États et aux agences internationales d’avancer au même rythme que la formation de bidonvilles urbains.

En clair, l’existence de bidonvilles n’est pas la conséquence inévitable de la surpopulation, mais de l’échec des politiques à tous les niveaux – mondial, national et local – et de l’adoption d’un paradigme international du développement qui ne donne pas la priorité aux besoins essentiels des pauvres.

Mythe n°2 : c’est la faute des pauvres

Beaucoup de gens continuent de rendre les pauvres responsables de leur misère.

D’après ce mythe bien ancré dans l’esprit des gens, ceux qui vivent dans les bidonvilles sont antisociaux, sans instruction, et rechignent à travailler, sinon, ils ne vivraient pas dans des conditions si sordides.

Contrairement à ces préjugés répandus, les anthropologues et les spécialistes du développement ont constaté depuis longtemps que les pauvres ne sont pas un fardeau pour les villes qui s’urbanisent, mais en sont souvent la ressource la plus dynamique. Si, au niveau individuel, les citadins pauvres ont fait preuve d’une inventivité prodigieuse pour construire des logements de fortune, la force collective a donné des résultats exceptionnels dans la construction de nouveaux logements et l’amélioration des logements des bidonvilles existants. C’est d’ailleurs ce que dit la documentation officielle sur le développement, qui préconise “l’amélioration des bidonvilles participative” comme étant la meilleure méthode pour les actions en faveur de l’habitat dans les pays en voie de développement.

Pourtant, pour chaque exemple de projet d’amélioration réussi élaboré par une collectivité, il y a un exemple d’opérations de destruction des bidonvilles et d’expulsions forcées. C’est un des problèmes les plus cruciaux de la lutte contre la pauvreté : les États reconnaîtront-ils et soutiendront-ils la capacité des pauvres à s’organiser et à contribuer à développer une ville qui les intègrera ou continueront-ils à considérer les habitants des bidonvilles comme des gens réfractaires au “progrès” et une menace pour les institutions traditionnelles ?

Mythe n°3 : les bidonvilles sont des lieux de criminalité, de violence et de fracture sociale

S’il y a bien un préjugé envers les citadins pauvres qui a la vie dure, c’est l’idée que les bidonvilles sont des lieux de fracture sociale et de désespérance, et que les habitants commettent des violences et des crimes.

Même s’il y a parfois un taux de criminalité élevé dans de nombreux bidonvilles dans les pays pauvres, la description qui est couramment faite de la vie dans les bidonvilles oublie les causes plus profondes de l’insécurité et de la violence – comme, par exemple, les liens entre le taux de criminalité et les problèmes de pauvreté, d’inégalités, d’exclusion sociale et de chômage des jeunes.

Ces facteurs intrinsèques (et, plus importants encore, les responsabilités et les échecs des pouvoirs publics) sont souvent occultés dans les films et les documentaires sur les bidonvilles. Nombreux sont ceux qui, dans les pays du Sud, font également preuve de solidarité mutuelle qui contredit ces stéréotypes négatifs, de même que d’innombrables exemples de dévouement, d’altruisme et de services communautaires servent de modèles louables à la société “mainstream”.

Il ne s’agit pas ici de glorifier ou de faire du sentimentalisme envers les citadins pauvres et leur système d’entraide pour le logement, car de nombreux bidonvilles peuvent, à l’opposé, se caractériser par un individualisme forcené et une exploitation mesquine. Mais trop souvent, l’idée reçue que les squatters sont des gens “différents” – qu’ils soient considérés comme des criminels, des oisifs, des parasites, des usurpateurs, des prostituées, des malades, des ivrognes ou des toxicomanes – est l’erreur la plus courante commise à l’égard de ceux qui vivent dans des quartiers pauvres des villes.

Mythe n°4 : les bidonvilles sont une étape inévitable du développement

Il y a un postulat sous-jacent au problème des bidonvilles et de la pauvreté urbaine, c’est que les pauvres finiront par atteindre notre niveau de vie s’ils adhèrent au système de libre échange tel que nous l’avons déterminé pour le développement. Cependant, les politiques de croissance industrielle menées par les pays développés ne s’appuyaient pas sur une idéologie libérale de libre échange et de non-intervention de l’État, mais plutôt sur des stratégies protectionnistes pour les industries importantes aux premiers stades de leur développement. On peut donc se demander pour quelle raison préconise-t-on la politique néolibérale pour les pays en voie de développement depuis les années 1970. La “science” de l’économie s’appuie également sur l’hypothèse que la croissance perpétuelle est le fondement du progrès, même si divers bilans ont fait naître des doutes sur les effets secondaires du capitalisme sans entrave sur les questions environnementales et sociales.

De plus, on peut se demander s’il est acceptable de considérer les conditions épouvantables et les violations des droits humains inhérentes aux villes au XIXème siècle comme étant la condition inévitable, bien que désagréable, du progrès dans une ville qui s’industrialisait rapidement comme Bombay ou Shanghai. Si ce n’est pas le cas, il nous reste à réfléchir à des objectifs différents et des modèles de développement plus holistiques qui privilégient les objectifs sociaux plutôt que les impératifs de rentabilité et le PIB en procédant à une distribution des ressources plus équitable au niveau national et mondial.

Mythe n°5 : le libre-échange peut mettre fin aux bidonvilles

Parmi ceux qui préconisent la mondialisation économique, beaucoup continuent d’accorder une confiance absolue au pouvoir des marchés pour en finir avec les bidonvilles.

Le postulat de base étant d’écarter l’État inefficace, et de s’en remettre au pouvoir bénéfique des marchés et aux capitaux privés qui serviront de leviers pour la croissance économique et la richesse générale. Mais, après des décennies où l’économie de marché était considérée comme le remède miracle aux maux du XXIe siècle, le nombre croissant de citadins qui vivent dans les bidonvilles est bien la preuve que la stratégie de la “croissance d’abord” pour le développement n’est pas viable. Se servir des forces du marché pour arbitrer la distribution des ressources ne peut qu’exclure certaines catégories sociales. D’autre part, le système ne fonctionne pas pour certains types de produits ou services, comme les logements destinés aux pauvres ou les aides sociales pour les personnes à faibles revenus.

La dérèglementation et la privatisation des services publics servent également à restreindre l’accès aux aides sociales et compromettent davantage la capacité des services publics à répondre aux besoins de ceux qui n’ont pas les moyens de se tourner vers le marché privé pour les logements, les soins médicaux, l’éducation et le système d’assainissement.

En résumé, les politiques de concurrence du marché mondialisé, censées créer des villes “de classe internationale” et fondées sur l’efficacité et la croissance, n’ont pas réglé la question des bidonvilles et sont plus susceptibles d’aggraver la pauvreté urbaine qu’être une solution pour l’avenir.

Mythe n°6 : la solution, c’est l’aide internationale

S’il y a peut-être davantage de projets qu’auparavant pour améliorer les conditions de vie des pauvres des villes, le système actuel d’aide publique au développement (APD) n’est pas parvenu, de toute évidence, à endiguer la vague croissante de formation de bidonvilles.

Le premier problème est simplement une question d’échelle, la réduction de la pauvreté urbaine ne figure pas dans les toutes premières priorités des agences multilatérales et des pays riches pour les aides financières. Plus important encore, c’est le décalage qui existe entre le genre d’aides nécessaires à améliorer les bidonvilles et les formes d’action qui sont actuellement proposées par les institutions d’aide internationale. Notamment, la majorité des agences d’aide au développement officielles n’ont pas réussi à développer des relations avec les habitants des bidonvilles et leurs organisations représentatives, et ne laissent guère les associations de pauvres jouer un rôle dans la conception et la mise en œuvre des programmes d’aides.

Les agences d’aides et des banques de développement n’ont pas pour principal souci de mener une politique de redistribution, qui serait capitale pour donner aux pauvres la maîtrise locale sur le processus de construction de logements. Alors que les ressources financières supplémentaires sont impératives pour améliorer les bidonvilles dans les pays en voie de développement, il est peu probable que les aides puissent répondre de façon satisfaisante à la crise du logement urbain sans un changement d’objectifs et de priorités des principaux pays donateurs et des institutions qui régissent l’économie mondiale.

Mythe n°7 : il y aura toujours des bidonvilles

De tous ceux qui traitent de développement urbain, peu d’entre eux imaginent un avenir sans bidonvilles. Dans les débats sur la pauvreté urbaine, qu’il s’agisse des défenseurs des “bidonvilles de l’espoir” ou des “bidonvilles du désespoir”, tous partent tacitement du principe qu’il y aura toujours des bidonvilles.

Une partie du problème vient de la sémantique: il est difficile de concevoir la disparition des “bidonvilles” quand le terme employé pour les décrire est restrictif et généralisé.

Les Objectifs du Millénaire des Nations Unies pour le développement des bidonvilles – visant à “améliorer sensiblement les conditions de vie de 100 millions d’habitants de bidonvilles d’ici 2020″ – acceptent également implicitement l’existence de bidonvilles comme une réalité durable, car la réalisation de ces objectifs (scandaleusement peu ambitieux) ne se soldera guère par la disparition des bidonvilles.

Si les tendances de l’urbanisation et les municipalités doivent permettre une intégration sociale durable, la politique de développement qui les soutient doit être complètement réformée et repensée. On ne peut pas créer un monde sans bidonvilles et sans pauvreté urbaine sans bouleverser les structures politiques, économiques et sociales actuelles.

Une première étape consisterait à reconnaître la possibilité de concevoir autrement le progrès humain en partant d’un choix fondamentalement différent de priorités mondiales – à commencer par l’engagement immédiat de couvrir les besoins vitaux de tous. Ce n’est qu’alors que le double objectif gravé dans le marbre d’Habitat II en 1996 pourra se traduire par un programme d’action concret : “un logement décent pour tous” et le “développement des établissements humains durables dans un monde qui s’urbanise“.

Cet espoir repose non seulement sur la mobilisation des forces grâce aux organisations politiques dans les pays du Sud, mais également sur la volonté des populations des pays riches de joindre leurs voix à celles des pauvres, de prendre conscience de l’importance de la justice et de la participation, et de renforcer le mouvement mondial pour une distribution plus juste des ressources mondiales.

Conclusion

On le voit : le système néo-libéral ne fonctionne vraiment que pour ceux qui le mettent en œuvre pour leur propre profit, et il est clair que ce ne sont pas les populations les plus démunies qui bénéficient de ces mesures. C’est, entre autres, la théorie néo-libérale dite du “ruissellement” qui a conduit à cette situation. C’est la fameuse “main invisible du marché” que préconisaient Reagan et Thatcher.

Si dans les pays du Sud, la misère est beaucoup plus flagrante, on retrouve ces conditions de vie, encore relativement marginales, dans les pays occidentaux. Aux États-Unis, la pauvreté touchait essentiellement les minorités, comme les Noirs ou les Latinos, en particulier immigrés. Des communautés qui vivent dans des ghettos coupées du reste de la population qui ne les voyait donc pas. Aujourd’hui, la situation tend à s’étendre à d’autres couches de la population.

Mais le mécanisme est le même: désengagement de l’État et des autorités locales, privatisation des services marchands des services publics, endettement et, donc, suppression progressive des aides sociales. Avec cela: compression du personnel, fermeture des usines, chômage endémique, crise des subprimes, politique agricole, il y a donc, aujourd’hui, faute de revenus, des localités et des quartiers, voire des grandes villes, en faillite et en décrépitude totale.

Et le même phénomène se constate au niveau mondial : mainmise du privé sur les services publics et endettement abyssal.


Article initialement publié sur le blog Des bassines et du zèle

A lire aussi: un dossier complet sur les bidonvilles : Histoire des bidonvilles

Photos : PaternitéPas d'utilisation commercialePartage selon les Conditions Initiales CUSOVSO ; PaternitéPas d'utilisation commercialePartage selon les Conditions Initiales uncultured ; PaternitéPas d'utilisation commerciale Xiaozhuli ; PaternitéPas d'utilisation commerciale SpecialKRB

]]>
http://owni.fr/2011/05/14/mythes-bidonvilles/feed/ 5